Le visage fermé ou les "larmes aux yeux", des chrétiens d'Irak ont assisté dimanche à une messe de Noël dans l'église chaldéenne de Paris, près de deux mois après l'attentat contre une cathédrale syriaque catholique qui a tué 44 fidèles et deux prêtres à Bagdad.
"A chaque fois que je rentre dans une église, j'ai les larmes aux yeux. J'ai perdu les mots des prières, même la prière +Notre Père+, je ne peux plus la réciter", confesse en arabe Mariam, l'une des rescapées de l'attentat du 31 octobre, après la messe.
Vêtue de noir, marchant à l'aide d'une canne, cette femme de 65 ans qui n'a pas souhaité donner son patronyme, est arrivée en France le 8 novembre avec son fils blessé et 52 autres chrétiens d'Irak.
"Mon coeur est là-bas, ma pensée est là-bas avec les familles qui sont restées, les familles qui ont perdu des leurs", raconte-t-elle encore, en sanglots.
Comme elle, environ 150 fidèles de la paroisse Notre-Dame de Chaldée à Paris (XVIIIe arrondissement) ont rempli dès 11H00 les bancs de cette petite église aux murs blancs, décorée en cette période de Noël d'une crèche et de quelques boules.
S'exprimant principalement en araméen, le prêtre évoque dans son homélie, à plusieurs reprises et en français, les "martyrs" tués à Bagdad en octobre dernier.
"C'est la première fois (depuis l'attentat) qu'on a pu les (les rescapés) rassembler ici, c'est ici leur maison commune", déclare après la messe monseigneur Yusif Petrus, vicaire des patriarches chaldéens en France.
La situation des chrétiens en Irak est "précaire, mais le bon Dieu interviendra", estime le prêtre.
Samedi, lors de son traditionnel message de Noël au Vatican, le pape Benoît XVI a demandé aux responsables politiques de manifester "une solidarité active" avec les "chères communautés chrétiennes en Irak et dans tout le Moyen-Orient".
Dans la bibliothèque de la paroisse, à l'abri de l'agitation causée par l'arrivée de poulet et de légumes déposés sur de grandes tables dressées pour l'occasion, un chrétien d'Irak arrivé en France il y a deux ans, se souvient.
"Je suis arrivé en 2008, après la mort de mon fils. Il avait 22 ans. Il était étudiant à l'université (...). Il ont mis une bombe dans la voiture. Pour rien", témoigne en anglais cet homme vêtu d'un costume foncé, qui a voulu garder l'anonymat.
"Les chrétiens n'ont pas d'arme (...). Ils veulent juste vivre heureux", ajoute-t-il.
"Il y avait 1,2 million de chrétiens en Irak. Aujourd'hui, ils sont moins de 500.000. Avant, on parlait de persécutions, de massacres. Maintenant, on peut parler de génocide", s'émeut quant à lui Elish Yako, secrétaire général de l'association d'entraide aux minorités d'Orient.
"Pour notre association, l'idéal serait qu'ils restent sur place. Mais il faut que l'on puisse garantir leur sécurité, un emploi et leur liberté de culte. Aujourd'hui, ce n'est pas le cas", martèle M. Yako, s'en prenant aux "donneurs de leçons en Europe qui disent aux Irakiens menacés là-bas, tous les jours, de rester sur place".
Source: AFP